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Au jour le jour
13 août 2009

Ben Bernanke sauveur du monde

Source : Le Monde du 13/08/2009.

Les économistes américains, écrit le Wall Street Journal, "sont unanimes" à souhaiter que le président Obama reconduise Ben Bernanke à la présidence de la Réserve fédérale (Fed). En réalité, il s'agit des membres d'un panel de 52 économistes que le quotidien des affaires estime représentatif de leur corporation et qu'il sonde régulièrement sur les thèmes les plus divers. Nombre d'économistes d'entreprise ou universitaires estiment cependant que les analystes financiers sont sur-représentés dans ce panel.

Sur les 47 qui ont répondu au sondage du quotidien, tous, à une exception près, jugent que l'actuel président de la Fed a fait ses preuves dans la tourmente et mérite d'être reconduit. Joseph Carson, analyste du fond d'investissement AllianceBernstein, résume ainsi l'opinion de ses confrères : M. Bernanke mérite "beaucoup de crédit pour la stabilisation des marchés financiers ; la confiance dans le rétablissement économique serait endommagée s'il n'était pas reconduit". M. Bernanke avait été nommé le 1er février 2006 par le président George Bush pour succéder au mythique Alan Greenspan, qui avait dirigé la Fed durant près de dix-neuf ans.

Le panel du Journal estime aussi qu'il y a 71 % de chances pour que Barack Obama demande à M. Bernanke de poursuivre sa tâche. Le panel est en revanche beaucoup plus optimiste que les membres du comité de politique monétaire de la Fed pour l'avenir : 27 sur 47 jugent que les Etats-Unis sont d'ores et déjà "sortis de la récession" et 11 autres qu'ils sont en train d'en sortir."

ça vaut bien un petit commentaire perso : tout d'abord, on ne sait pas si on est sorti de la crise ou non. ensuite, en effet, la Fed a injecté des  milliers de Mds $ dans les marchés financiers qui ont été tout heureux de voir ce pactole gratuit ou presque arriver. les entreprises US ont licencié à tour de bras. est-ce que ces nouveaux chômeurs (ils sont plusieurs millions) vont relancer l'économie en consommant leur prime de licenciement ? j'en doute. Sans compter que des échéances de remboursement arrivent pour d'autres produits de prêts toxiques, avec des sommes qui sont bien plus fortes que celles en jeux dans les subprimes. et là, ce ne sont plus les particuliers qui sont touchés, mais les entreprises. et une entreprise touchée, c'est plusieurs particuliers touchés. enfin, des types qui n'ont rien vu venir sur ce qui c'est passé et rien fait (il a fait quoi Bernanke à part injecter des liquidités sur les marchés ?) sont les sauveurs du monde et savent mieux que nous l'avenir ? parce que si la crise est plus forte que celle de 29, il faut se rappeler qu'à cette époque aussi l'économie avait rebondi en 1930/1931 avant de toucher un fond en 1933 bien plus bas qu'en 1929. alors si l'histoire se répète (et c'est bien parti pour vu l'optimiste béat de gens qui n'y pigent rien en économie), la sortie de crise est transitoire et 2010 à 2012 ne seront pas une partie de plaisir !

Voilà que le 14/08 sont publiées deux autres informations, parfaitement discordantes avec l'euphorie des analystes financiers :

- les inscriptions hebdomadaires au chômage ont augmenté (par rapport à la semaine précédente on suppose) de 4.000 aux Etats-Unis lors de la semaine au 8 août, pour s'établir à 558.000 alors que les économistes avaient tablé sur une baisse.

- Le nombre de saisies de logements a ainsi bondi de 7% par rapport au mois précédent et de 32% sur un an. Un ménage sur 355 ayant contracté un prêt pour acheter sa maison est l'objet d'une procédure de saisie

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Si la Fed jugeait il y a deux mois que "le rythme de la contraction économique se ralentit", elle estime maintenant que "l'activité économique se stabilise". Pourtant, à New York, Wall Street a bien mieux réagi à ce communiqué qu'à celui de juin : le 12 août, le Dow Jones a gagné 1,30 %.

Pour Mark Zandi, chef économiste de Moody's, la banque centrale américaine est "de plus en plus confiante dans la direction que prend l'économie" et cette confiance dope les marchés. L'organisme d'analyses indépendant Naroff Economic Advisors est encore plus catégorique : la légère inflexion dans les termes utilisés par la Fed "montre que ses membres pensent que la récession est finie".

La seule question, désormais, est de savoir "quelle sera la vigueur de l'expansion, car il est essentiel que la relance n'échoue pas". Mercredi soir, l'équipe économique de la banque américaine Goldman Sachs a rehaussé sa projection de croissance de l'économie des Etats-Unis au second semestre de 1 % à 3 %.

La Fed n'en est pas encore là et semble surtout soucieuse de ne pas susciter d'espoirs disproportionnés. Ses deux jours de réunions ont ainsi accouché de décisions qui, presque toutes, étaient attendues. Elle a maintenu ses taux directeurs au plus bas (dans une fourchette entre 0 % et 0,25 %). Fin juillet, Ben Bernanke, son président, avait expliqué que "lorsque l'économie recommencera de croître, il sera très important que la Fed démantèle (son dispositif pour juguler la crise) et augmente ses taux". Visiblement, si la récession est "finie", la croissance n'est pas encore suffisamment au rendez-vous. La Fed estime que le taux de l'argent au jour le jour "restera encore extrêmement bas durant une longue période".

"Signes de stabilisation"

Car même si les conditions sur les marchés financiers "continuent de s'améliorer" et que la consommation des ménages - élément clé de la relance - "montre des signes de stabilisation", la reprise économique, note la Fed, reste "entravée par la poursuite des pertes d'emplois, une croissance très lente du revenu, la baisse du patrimoine immobilier et un crédit restreint". Bref, si reprise il y a, c'est une "reprise de statisticiens", comme le dit par dérision l'économiste en chef de la banque Wells Fargo : une reprise qui apparaît certes dans les statistiques mais qui, "pour des millions d'Américains, ne se matérialisera pas en termes d'emplois ou de revenu pendant au moins encore un an".

Quant à la consommation, si les dépenses des particuliers et des sociétés restent au plus bas, ce n'est pas seulement parce qu'en période de forte incertitude ils continuent de privilégier l'épargne, c'est aussi parce que l'accès au crédit reste resserré, malgré les centaines de milliards de dollars injectés par la Fed dans les organismes de crédit. Le moment n'est pas encore venu pour celle-ci de relâcher le dispositif anticrise qu'elle a mis en place, dont l'amélioration de l'accès au crédit est un des objectifs prioritaires.

Preuve que cet objectif n'est pas atteint, la Fed, qui devait boucler son plan d'acquisition de 300 milliards de dollars (210 milliards d'euros) d'obligations à long terme du Trésor américain d'ici fin septembre (elle en a déjà acquis 253 milliards de dollars), a annoncé ralentir le rythme de ses acquisitions pour ne les boucler que fin octobre. Cette opération avait pour objectif de faire baisser durablement les taux d'intérêt à long terme, afin d'aider la relance du secteur immobilier et des marchés très dépendants du crédit (achat d'automobile, éducation...).

La crise étant partie de l'immobilier, la sortie de crise passerait donc par sa reprise. Mais l'efficacité de cette mesure est contestée par nombre d'experts, pour qui les résultats attendus ne se manifestent pas alors que cette mesure contribue massivement à faire tourner la planche à billets.

Un nombre croissant d'économistes jugent que les montants faramineux de liquidités qui ont été injectés sur un court laps de temps dans l'économie américaine risquent de générer une inflation massive dès que la reprise sera réellement au rendez-vous.

La Fed, elle, a reconduit au mot près l'analyse qu'elle faisait il y a deux mois, selon laquelle "l'inflation resta encore faible pour un certain temps". Manière de dire qu'elle continue de craindre prioritairement le risque déflationniste.

 

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