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Au jour le jour
13 mars 2011

Après Italie - France du tournoi 2011

Les claques, ça fait toujours du bien quand on en recherche les causes et qu'on fait en sorte de ne pas en prendre d'autres, au moins pour les mêmes raisons. En cela, le fiasco d'hier face aux Italiens doit beaucoup nous servir. Même s'il faut tirer un coup de chapeau à nos voisins transalpins, qui accrochent deux scalps français en cette saison 2010-2011 (après la victoire d'Aironi sur Biarritz en Coupe d'Europe), et qui méritent largement ce succès, voyons un peu ce qui cloche chez nous.

Si en hiver, certains épluchent les légumes, moi j'épluche les fiches de matchs des grandes nations du rugby. Et si j'y mets la France, c'est plus pour son passé que pour son présent. Mais pour se comparer aux meilleurs nations, rien de tels que quelques statistiques.

Les années Laporte

Revenons quelques instants sur le passé et les (trop ?) longues années Laporte (8 ans quand même). Monsieur "Madrange" nous a apporté (trop tôt) la théorie des blocs (qui marcha une grosse saisson avant d'être décryptée fin 2002), 2 grands chelems et deux places de 4è en coupe du monde. Soit, si on enlève la cuvée 1991, les moins bons résultats de l'équipe de France dans la compétition mondiale. Au delà du bilan mitigé, je retiens surtout les essais de Bernie à quelques mois de la compétition reine, notamment à des postes clefs :

- dans le tournoi 2003 (donc à 8 mois de la coupe du monde), la charnière idéale était toujours recherchée avec notamment les essais de Gélez en 10 et de Yachvili en 9. Gélez ne verra pas le pays des kangourous et Yachvili y cirera le banc.

- dans le tournoi 2007, Skrela-Mignoni semblait donner satisfaction avant d'être mis au second plan après la gifle du match inaugural de la CM face aux Argentins.

On l'a beaucoup oublié, mais ce n'était guère mieux (ou pire) que Lièvremont. Et pour finir, the famous ex-ministre des sports nous fait un beau discours "on ne tire pas sur l'ambulance" dans les heures qui suivent le fiasco face aux Italiens. Et le lendemain dans une émission radiophonique, se permet de mitrailler joueurs, entraîneurs et dirigeants en place. "A m'en donné", il vaut mieux fermer sa grande gueule M. Laporte ou au moins, avoir un discours cohérent et non un comportement de girouette (les épisodes bayonnais étant un autre exemple).

Les années Lièvremont

Que de belles promesses début 2008 avec l'arrivée d'un encadrement tout neuf aux manettes de l'EdF de rugby. L'année 2008 et notamment le tournoi des VI nations devait être l'occasion d'une revue d'effectif pour resserer le groupe en 2009-2011 et préparer sur 3 ans la coupe du Monde 2011. Ce beau projet a vite fait flop. D'une part, le groupe n'a jamais véritablement été resseré avec toujours de bonnes raisons de l'ouvrir et de tester de nouveaux joueurs. Les raisons parfois liées à des contraintes (tournée estivale sans les finalistes ou demi-finalistes du Top14) ont souvent été du fait de l'entraîneur. Les derniers tests proposés lors de la tournée des équipes australes en novembre 2010 en fut le sommum : non seulement, elle a permis de voir ou revoir des joueurs sans expérience internationale avérée (ni même au niveau européen en coupe d'europe), mais aussi, elle a semblé indiquer aux "titulaires" qu'ils n'en étaient point et qu'au final meilleurs qu'eux existaient. Au final, gros loupé avec la dérouillée face aux Australiens. Du coup, bis-repetita pour le dernier tournoi avant la CM, en redonnant une chance à certains mais en refermant le groupe, avec un discours assez clair : à quelques rares exceptions, ce serait le groupe des 30 pour la CM.

Tous ces essais (de joueurs) m'ont incité à éplucher les équipes composées par notre sélectionneur national et à comparer avec ses homologues étrangers. Je n'ai fait l'analyse que sur les lignes arrières sur lesquelles les errements du staff furent et sont encore nombreuses.

Tout d'abord, comparons le nombre de joueurs titularisés du 9 au 15.

Im1

Sur le nombre de matchs joués (en bleu marine), on voit déjà que les nations du sud (hors Argentine qui joue deux fois moins de match) sont devant les nations européennes (alors que celles-ci comptabilisent le tournoi 2011 à 80%). De plus, point crutial, la saison des nations du sud est bien plus équilibrée :
- le championnat (super15) démarre en février (l'équivalent d'août dans notre hémisphère) avec une phase finale en juin (décembre)
- la saison internationale démarre à la suite avec les tournées estivales des nations du nord dans l'hémisphère sud
- la saison internationale se poursuit avec le Tri-nations pendant l'hiver austral
- après une pause d'un mois et demi, c'est la tournée d'automne dans notre hémisphère pour conclure la saison fin novembre.

A comparer avec nos saisons du nord qui mixent ligues nationales, coupes d'europe, tournée d'automne, tournoi des VI nations et tournée estivale (avec quelques doublons) dans un calendrier en millefeuilles qui démarre fin août pour finir début juin.

Ce simple premier constat explique pourquoi seule l'Angleterre a réussi à briser (une fois) l'hégémonie des nations du sud lors des 6 dernières coupes du monde.

Concernant le nombre de joueurs titularisés (en orange), la France (Lièvremont ?) réussit l'exploit d'avoir fait démarrer plus de joueurs que de matchs joués au simple places arrières (36 joueurs pour 35 matchs). A l'opposé, l'Australie n'a fait joué que 20 titulaires. Et si les Anglais ne sont pas loin de nous (33 joueurs pour 37 matchs), force est de constater que le groupe est aujourd'hui resserré et que les joueurs arrières sont installés depuis au moins le début de la tournée automnale 2010, quel que soit les résultats.

Voyons maintenant dans le détail les lignes arrières.

LES TROIS QUARTS

Avec le graphique ci-dessous, on va voir qu'à tous les postes (sauf les ailiers et de peu), la France a titularisé le plus de joueurs parmi les 7 nations principales du rugby mondial (analyse non faite sur les Argentins).

Im2

En 15 (barres jaunes), 9 arrières testés contre 5 pour les équipes qui ont le moins expérimenté (NZ, GAL, AUS) et 7 pour les Anglais, second dans ce domaine. Mais si on cherche toujours notre 15, Foden fait maintenant l'unanimité outre-manche.

Côté ailiers (barres noires), seuls les Blacks font mieux (ou pire) que nous avec 13 ailiers titularisés, contre 12 pour nous. A l'opposé, les Australiens (avec 8 matchs de plus) n'ont eu besoin que de 7 n°11 et 14 et trois autres nations ont eu recours à 9 "sprinteurs". Voyons les associations d'ailiers (en jaune), même si en théorie, c'est la triplette 15-14-11 qui devrait être étudiée. Et là, on explose à nouveau les records avec 20 paires d'ailiers différentes frappées du coq. Les Kiwis sont à 18, le XV du poireau est à 15 et les moins adeptes du changement sont à 10 (3 nations).

Passons au centre pour constater que 13 perforateurs ont été testés par ML pour 19 associations différentes. Les Anglais suivent assez loin avec 12 centres pour 13 paires différentes. On envie les Irlandais avec 8 centres et 6 paires testées.

LA CHARNIERE

Vous n'étes pas convaincu que trop d'essais ont eu lieu. Voyons alors la charnière.

Im3

Oh surprise, nous laissons le bonnet d'âne aux Anglais qui ont testé 6 demis de mêlée (barres rouges) contre 5 pour nous (et l'AFS, GAL et NZ). Seuls Australiens et Irlandais n'ont fait tourné que 3 numéro 9. Mais pas "d'inquiétude, avec 6 demis d'ouverture (barres bleues), nous gagnons le ponpon des essais. Là encore, Aussies et Celtes en ont testé la moitié. Et pour les 9 et 10 réunis, nous battons aussi le record avec 13 charnières différentes (barres vertes). Soyons bon seigneur, Anglais, Blacks, Diables rouges et Boks ne sont pas loin derrière.

LE BILAN

Preuve par les chiffres sur les 4 dernières saisons, nos sélectionneurs ont joué moins de matchs que les autres nations (hors Argentine) mais ont testé plus de joueurs dans les lignes arrières et à la charnière, que ce soit au global, poste par poste ou dans les associations clefs. Il faudrait ajouter un autre point négatif : l'absence de hiérarchie et la remise en cause perpétuelle à tous les postes ou presque à partir du 9.

En effet, faire des essais n'empêche pas de dégager une hiérarchie et de faire jouer certains joueurs plus que d'autres. Mais là encore, force est de constater que ceux qui ont joué le plus en équipe de France sont loin des titulaires (ou titularisés) étrangers :

- 10 passages en 15 pour l'arrière le plus vu en EdF contre 37 apparations de Muliaina en dernier sauveur du XV NZ, 27 de Byrne pour les Gallois, et entre 15 et 20 pour les autres nations (sauf les Boks où Kirchner et Jantjes ont joué 11 fois au poste).
- Et à l'aile où la vie est belle ? Notre ailier le plus vu est Clerc avec 14 apparitions (certes, il fut absent des terrains 8 mois en 2008 pour blessure). Sivivatu est à 22, Cueto 25, Mitchell 26, S. Williams et Bowe 28, Habana à 32 ! Côté associations 11-14, 5 fois la plus vue des paires bleues, contre proche de 10 et au delà pour les autres nations (jusqu'à 18 côté Boks).
- Et au centre, nous avons notre inamovible Jauzion. Inamovible ? 22 titularisations contre 24 pour J. Roberts, 29 pour De Villiers, 32 pour O'Driscoll et 35 pour Nonu. Pour les paires de centre, c'est au mieux 6 (Jauzion - Bastareaud) contre 17 aux Irlandais et 13 aux Boks.
- La charnière, c'est peut-être là qu'on est au plus près du standard internationnal avec Parra / Trind'Huc titularisés 14 fois. Seuls les NZ et les Aussies ont fait mieux. Mais malgré notre charnière à presque mi-temps, les joueurs 9 et 10 n'ont pas assez joué (ensemble ou avec un autre). Parmi les n°10 mondiaux, seul T. Flood a été moins titulaire que FTH. Pour les n°9, sans être à la traîne, Parra n'a pas joué autant que Burgesss, Cowan ou Phillips.

Au final, on ne peut que constater l'échec de Mathieu Lievremont dans sa recherche d'un XV type. Changer sans cesse les joueurs a nui à la mise en place d'automatismes et a empêché de trouver, par ses automatismes, un fond de jeu., un brin huilé. A 3 matchs de l'ouverture de la coupe du monde pour notre XV du Coq, le chantier reste immense et les discours ne suffisent plus : il faut des actes, des actes forts pour éviter que le rugby ne se plante comme les footeux en 2010. Car si notre poule est accesible, c'est un 8è de finale qui nous est promis face au Tonga à l'automne en guise de dessert de poule, une semaine après avoir affronté le XV à la fougère.

Nous avons besoin d'hommes forts à la tête du XV de France, que ce soit sur le terrain et en dehors.

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